Comment l’entreprise peut-elle vraiment réduire les accidents

Sécurité routière au travail : comment l’entreprise peut-elle vraiment réduire les accidents ?

Sur les routes, ce ne sont pas seulement des véhicules qui circulent : ce sont aussi des salariés qui travaillent. Chauffeurs-livreurs, conducteurs poids lourds, coursiers, techniciens itinérants, commerciaux… Une grande partie de l’activité économique repose sur des métiers exposés au risque routier. Pour l’employeur, ne pas traiter ce sujet revient à laisser s’installer un risque majeur, avec des conséquences humaines, juridiques et financières importantes.

Un accident de la route impliquant un salarié peut entraîner des blessés graves, des arrêts de travail répétés, des désorganisations de planning, mais aussi une atteinte à l’image de l’entreprise. C’est tout l’enjeu de la sécurité routière au travail : passer d’une logique « on gère quand ça arrive » à une vraie stratégie de prévention structurée.

Pourquoi la sécurité routière est-elle un enjeu clé pour les employeurs ?

Pour de nombreuses entreprises, le risque routier représente l’un des premiers risques d’accident du travail. Il concerne aussi bien les chauffeurs poids lourds que les livreurs du dernier kilomètre, les transporteurs événementiels, ou encore les salariés qui utilisent leur voiture pour se rendre à des rendez-vous professionnels.

Les conséquences sont multiples :

  • Coût humain : blessure, séquelles physiques ou psychologiques, parfois handicap durable.
  • Coût social : absentéisme prolongé, difficultés de remplacement, surcharge pour les équipes restantes.
  • Coût économique : véhicules immobilisés, pénalités de retard, perte de contrats, hausse des primes d’assurance.
  • Coût organisationnel : planning à reconstruire en urgence, clients mécontents, tensions internes.

Quand un accident a des conséquences importantes, il peut déboucher sur un arrêt de travail long. Pour mieux comprendre l’impact spécifique sur les métiers du transport, un article dédié détaille les situations des chauffeurs, livreurs et coursiers : arrêt de travail et métiers de la logistique et du transport .

Pour aller plus loin sur les chiffres, les mécanismes des sinistres et les typologies d’accidents, vous pouvez aussi consulter l’analyse dédiée aux accidents de la route au travail, qui complète utilement cette approche par une vision statistique et réglementaire.

Identifier les salariés les plus exposés au risque routier

La première étape d’une démarche de prévention efficace consiste à cartographier les postes exposés. Dans beaucoup d’entreprises, le risque routier ne concerne pas seulement le service transport :

  • Chauffeurs-livreurs (colis, messagerie, alimentaire, BTP…).
  • Conducteurs poids lourds en régional, national ou international.
  • Coursiers urbains (vélo, scooter, moto, voiture).
  • Techniciens d’intervention (maintenance, SAV, informatique, énergie…).
  • Commerciaux et cadres itinérants qui enchaînent les kilomètres.

Pour chacun de ces profils, l’employeur peut analyser :

  • Le nombre de kilomètres parcourus par an.
  • Les types de routes utilisées (urbain dense, autoroute, réseau secondaire…).
  • Les horaires (tôt le matin, nuit, fins de tournées tardives…).
  • Les contraintes spécifiques : livraison en centre-ville, accès chantier, événements, zones difficiles.

Cette analyse permet de prioriser les actions de prévention et d’adapter les mesures au terrain réel plutôt qu’à une vision théorique de l’activité.

Agir sur l’organisation du travail pour réduire les risques

La sécurité routière ne se joue pas uniquement derrière le volant. Elle se construit aussi dans les bureaux, au moment où l’on organise les tournées, les délais et les objectifs. Des plannings irréalistes ou une pression excessive sur les horaires peuvent pousser les salariés à prendre plus de risques :

  • Rouler trop vite pour « rattraper le retard ».
  • Réduire les pauses ou conduire fatigué.
  • Consulter le téléphone ou le GPS tout en conduisant.

Une politique de prévention sérieuse passe par quelques décisions structurantes :

  • Prévoir des temps de trajet réalistes en tenant compte du trafic.
  • Intégrer dans les tournées de véritables pauses, notamment pour les longues distances.
  • Limiter les amplitudes horaires trop importantes.
  • Éviter d’ajouter des livraisons de dernière minute sans revoir l’organisation globale.

Ces ajustements peuvent sembler modestes, mais ils ont un effet direct sur la fatigue des conducteurs, le stress ressenti et donc le risque d’accident.

Former et sensibiliser les salariés à la sécurité routière

Les salariés exposés à la route ont souvent de l’expérience, mais cela ne suffit pas toujours. Une démarche de prévention efficace s’appuie sur des actions de formation régulières :

  • Rappels des règles de base (distances de sécurité, adaptation de la vitesse, conduite par mauvais temps).
  • Ateliers sur les effets de la fatigue, du manque de sommeil et du stress.
  • Focus sur les distractions : smartphone, GPS, messageries instantanées, etc.
  • Retour d’expérience après un incident ou un quasi-accident.

Certaines entreprises vont plus loin en organisant des stages de conduite préventive, des simulations d’accidents ou des sessions de sensibilisation sur les conséquences d’un accident grave, tant pour le salarié que pour l’entreprise.

Adapter les véhicules et les équipements

Un véhicule mal entretenu ou mal équipé augmente les risques d’accident ou de panne en situation délicate. La prévention passe aussi par une gestion rigoureuse du parc :

  • Entretien régulier (pneus, freins, éclairage, direction…).
  • Équipements adaptés à l’activité (arrimage, sangles, barres, caisses…).
  • Véhicules modernes avec aides à la conduite (ABS, ESP, aide au freinage, régulateur/limiteur de vitesse…).
  • Vérifications systématiques avant le départ (tour du véhicule, chargement correctement sécurisé).

Dans les métiers du transport événementiel ou de la messagerie, où l’on manipule souvent du matériel volumineux, fragile ou de grande valeur, la qualité de l’arrimage et des équipements de manutention est déterminante pour éviter les accidents lors des chargements et déchargements.

Encadrer l’usage du téléphone et des outils numériques

Le smartphone est devenu l’un des principaux facteurs de distraction au volant. Entre les appels, les messages, les applications de navigation ou les plateformes de livraison, beaucoup de conducteurs sont sollicités en permanence.

L’employeur a un rôle essentiel pour poser un cadre clair :

  • Rappeler qu’aucun message ou appel n’est prioritaire sur la sécurité.
  • Interdire les instructions envoyées à un conducteur en mouvement (ex. : modification lourde de tournée).
  • Encourager les salariés à s’arrêter dès qu’ils doivent lire un message, renseigner un GPS ou répondre à un appel.
  • Adapter les outils numériques pour limiter les manipulations en roulant.

Intégrer la sécurité routière dans la politique RH et la prévention globale

La sécurité routière ne doit pas être traitée comme un sujet à part, isolé dans un coin du document unique. Elle s’inscrit dans une démarche globale de prévention des risques professionnels, au même titre que les troubles musculosquelettiques, les risques psychosociaux ou la sécurité sur site.

Concrètement, cela peut se traduire par :

  • Une analyse formelle du risque routier dans le document unique d’évaluation des risques.
  • Un plan d’action pluriannuel avec des objectifs réalistes (réduction du nombre d’accidents, amélioration des formations, renouvellement du parc…).
  • Des temps d’échange avec les représentants du personnel et le CSE.
  • Un suivi plus étroit des accidents de trajet et de mission pour en tirer des enseignements.

L’idée n’est pas de culpabiliser les conducteurs, mais au contraire de partager la responsabilité entre l’employeur (organisation, moyens, règles) et les salariés (comportement, respect du code de la route, vigilance).

Conclusion : une prévention routière gagnante pour tous

Mettre en place une vraie politique de sécurité routière au travail, ce n’est pas seulement « respecter la loi ». C’est aussi protéger les salariés, stabiliser les équipes, limiter les arrêts de travail, sécuriser la relation avec les clients et montrer que l’entreprise prend au sérieux la santé de ses collaborateurs.

En travaillant sur l’organisation des tournées, la formation, les véhicules, l’usage du téléphone et l’accompagnement après un accident, l’employeur peut réduire significativement le nombre d’accidents liés à la route. C’est un investissement qui se traduit, à terme, par moins d’absentéisme, plus de confiance et une meilleure performance globale.

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